Or, c’est la branche française de ce mouvement qui inventa le transhumanisme cher à Elon Musk, dont le grand-père fut responsable de la branche canadienne du mouvement technocratique.
es déclarations du président états-unien réélu, Donald Trump, avant son investiture, annonçant qu’il se proposait d’acheter le Groenland (ce qu’il avait déjà comparé en 2019 à une « grosse transaction immobilière ») et d’annexer aussi bien le Canada que le canal de Panama nous ont stupéfaits. Aucun dirigeant occidental n’avait tenu de tels propos depuis la Seconde Guerre mondiale. La classe dirigeante états-unienne y a plutôt vu une « nouvelle frontière », c’est-à-dire de nouveaux territoires où leur pays pourrait continuer sa progression.
Le gouvernement danois, dont dépend le Groenland, a indiqué que celui-ci n’est pas à vendre, que c’est un « territoire autonome » dont seuls les Groenlandais sont propriétaires. Le chancelier allemand, Olaf Scholz, a appelé que « le principe de l’inviolabilité des frontières s’applique à tous les pays... qu’il s’agisse d’un très petit, ou d’un pays très puissant. » Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a commenté : « Il ne fait évidemment aucun doute que l’Union européenne ne laisserait pas d’autres nations du monde s’attaquer à ses frontières souveraines. » Selon le ministre britannique des Affaires étrangères, David Lamy, Donald Trump « soulève des inquiétudes à propos de la Russie et la Chine dans l’Arctique, qui concernent la sécurité économique nationale » des États-Unis, Ce sont « des questions légitimes. » Enfin, pour la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, ces déclarations sont « davantage un message destiné » à « d’autres grandes puissances plutôt que des revendications hostiles envers ces pays. Il s’agit de deux territoires où ces dernières années nous avons assisté à un activisme croissant de la Chine. »
Le Premier ministre du Canada, Justin Trudeau, qui s’est fait élire en tant que fils de Pierre Trudeau et donc comme défenseur de l’indépendance nationale, s’est avéré n’être qu’un suiviste de Washington. Il n’avait donc rien à répondre à ce qui paraît être une évidence : en adhérant aux États-Unis, son pays n’aurait rien à perdre qu’il n’a déjà perdu et tout le reste à gagner. Il a donc démissionné.
Concernant le canal de Panama, Donald Trump avait insinué qu’il était exploité par l’armée chinoise. Le président du Panama, José Raúl Mulino, lui a répondu : « Le canal n’est contrôlé, directement ou indirectement, ni par la Chine, ni par la Communauté européenne, ni par les États-Unis ni par toute autre puissance. En tant que Panaméen, je rejette fermement toute expression qui déforme cette réalité ».
Nous allons exposer ici que ces idées d’annexion ne sont pas nouvelles, mais datent de la crise de 1929, et qu’elles correspondent à un corpus idéologique cohérent défendu, jusqu’à la semaine dernière, par le seul multi-milliardaire Elon Musk que nous connaissions plutôt comme un admirateur de l’ingénieur serbe Nicolas Tesla et comme un adepte du transhumanisme.
Lors de la « Grande dépression », c’est-à-dire de la crise de Wall Street et de la tempête économique qui suivit, la totalité des élites états-uniennes et européennes considéra que le capitalisme, sous sa forme d’alors, était définitivement mort. Joseph Staline proposa le modèle soviétique comme seule réponse à la crise, tandis que Benito Mussolini (ancien représentant de Lénine en Italie) proposa au contraire, le fascisme. Mais aux États-Unis, une troisième solution fut proposée : la technocratie.
Critiquant la lecture traditionnelle de l’offre et de la demande, l’économiste Thorstein Veblen s’intéressa aux motivations des acheteurs. Il montra que l’homme qui peut s’offrir du loisir le fait en réalité pour conforter sa supériorité sociale, et doit par conséquent le montrer. Les loisirs ne sont donc pas une forme de paresse, mais « expriment la consommation improductive du temps ». Par conséquent, dans de nombreuses situations, contrairement à ce que l’on croit, « Plus le prix d’un bien augmente, plus sa consommation augmente également » (paradoxe de Veblen). Ce ne sont donc pas les prix, mais les comportements de groupe et les motivations individuelles qui dictent l’économie.
La pensée iconoclaste de Thorstein Veblen donna naissance, entre autres, au mouvement technocratique d’Howard Scott. Celui-ci imagina que le pouvoir ne soit donné ni aux capitalistes, ni aux prolétaires, mais aux techniciens.
Ce mouvement s’est exporté en France autour de polytechniciens, notamment le romancier ésotérique Raymond Abellio (qui fonda la secte dont François Mitterrand fut membre jusqu’à sa mort) et de Jean Coutrot, l’inventeur du transhumanisme. De fil en aiguille, ce mouvement aurait engendré dans les milieux occultistes du régime de Philippe Pétain une société secrète, la Synarchie.
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